Orion Clinic
Suite directe de "blood of my blood"

Elle avait levé les yeux au ciel. Comme si ça avait la moindre importance, toutes ces histoires imbéciles, entre gangs, d'alliances - alors qu'elle avait eu beaucoup plus à penser que son travail et ses responsabilités. La colère qui habitait Cecil, elle la connaissait par coeur ; une colère froide, un agacement succinct, dont il finirait par se détacher - rien d'inquiétant, se disait-elle. Elle avait traversé le couloir sans s'en faire, le pas léger.

Mais lorsque la porte se referma, et que Grey était resté devant celle-ci, une menace tomba, immédiatement. Un sentiment lourd oppressa sa poitrine et elle n'eut pas le temps de l'identifier que déjà un bruit sec résonna dans la pièce.

La main de Cecil claqua amèrement sur sa joue.
Attrapait ensuite son bras, l'enserrait à en couper la circulation.
Sonnée, le regard ne s'accrochait nulle part, le cœur s'emballa, le système nerveux en état d'impuissance.

Blanche était restée choquée, muette, interdite, bousculée par le contact physique, et inquiète de ne pas l'avoir vu venir. En asphyxie alors qu'elle ne comprenait pas ce qui était en train de lui arriver.

Je-

Les mots ne sortaient pas, le souffle s'épuisa au bord des lèvres, et les yeux ne parvenaient plus à trouver le visage de Cecil. Elle voyait flou.

De quoi tu me parles ?

Une émotion grandissait. La gorge serrée, les mâchoires crispées, ses pensées divaguaient. Ne voulaient pas voir un Cecil qui s'était permis de lever une main sur elle.

Elle se mit à rire.

Haha, tu me fais une blague, Cecil, c'est ça ?

Nerveuse, tentait de lui faire lâcher son bras, sans forcer, en secouant et s'écartant légèrement.

Cecil, t'es pas vraiment fâché. Tu sais que j'avais juste la tête ailleurs. Tu m'aimes, et tu es inquiet, c'est tout. T'es pas vraiment en colère.

La tête ailleurs, elle ne répondait pas du tout à la question - parce qu'elle avait complètement dissocié, et n'alignait plus la moindre pensée.

Orion Clinic
Suite directe de "blood of my blood"

Braquée, chacun de ses muscles s'était raidi à en devenir douloureux. Le regard figé sur le visage de Cecil, sans le voir pour autant. Les questions de Cecil l'oppressaient, et elle eut du mal à revenir à elle.

Pheme...

Quelque part, au fond d'elle, Blanche savait qu'elle avait causé la mort de quelqu'un. De quelqu'un d'important, que Cecil aimait - que Blanche respectait aussi, d'une certaine manière. Elle avait isolé sa culpabilité tout au fond d'elle, car ça n'avait jamais été réel. Elle le savait, mais n'en avait pas compris l'ampleur, les conséquences.

Elle avait tué quelqu'un.
Quelqu'un qu'elle connaissait, dont elle connaissait la voix et le visage. Et tout ça n'existerait plus, parce qu'elle avait fait un caprice de trop.

Non, elle n'avait tué personne.
Ce n'était pas elle, ce n'était pas Ace.
Elle avait disparu. C'étaient les CG.

Non, non, non !

Elle voulu reculer, mais le mouvement ne se déclara qu'à moitié, et elle essayait de secouer la tête. Mais elle était bien immobilisée, et elle se sentit prisonnière.

Je n'ai rien fait, Cecil, je suis informatrice, INFORMATRICE.

Elle semblait perdre pieds, perdre son souffle. Le cœur s'emballait, et l'empathie forcée sur Cecil faisait qu'il ressentait la même angoisse grimper en lui.

Elle a disparu parce que Edge voulait qu'elle disparaisse. Ce n'est pas moi, ce n'est pas Ace, ce n'est pas moi, ce n'est pas moi !

Son souffle tremblait.

Lâche-moi, Cecil... Ce n'est pas moi, pitié, ce n'est pas... moi.

Orion Clinic
Suite directe de "blood of my blood"

La panique avait envahi tout son système. L'angoisse avait grimpé pour ne jamais redescendre, et enserrait sa gorge douloureuse, le regard figé sur Cecil. Des syllabes s'échappaient de ses lèvres, sans donner aucun mot, et ses mains tremblaient, son dos allant d'avant en arrière, légèrement.

Je-

Elle secoua la tête.
Arrête ça, avait-il dit.
Alors elle s'était enfermée au fond d'elle-même, s'était accroupie par terre, le dos recourbé, le regard vide, enfermait à l'intérieur tout ce qui faisait que Blanche était Blanche.
Toute seule à l'intérieur d'elle-même, toute seule dans son propre monde, toute seule car elle faisait du mal lorsqu'elle était avec les autres.

Blanche, toute seule.

Pardon, pardon...

Elle se mordit la lèvre inférieure, croisa les bras sur ses genoux, et ne releva pas la tête.

Je voulais juste que tu m'aimes. Il n'y a que toi qui compte. Pardon.

Parlait-elle à Cecil ou se parlait-elle à elle-même ?
Blanche était toute petite, recroquevillée.

Il m'aime vraiment, tu sais ?

Sa voix faiblarde, murmurait au creux de ses jambes.

Il m'aime alors il ne fera rien qui me fera du mal. Ils m'aiment tous. Ils me l'ont dit. Je sais qu'ils m'aiment.

Romeo, Ace, Cecil, Samael.
Elle ferma les yeux.

Pourquoi avait-elle toujours si mal, si ils l'aimaient tant qu'ils le prétendaient ?

Cecil m'aime. Il ne me fera jamais de mal. C'est moi. C'est moi. Pardon, pardon. J'ai été mauvaise, pardon.

Orion Clinic
Suite directe de "blood of my blood"

Elle avait relevé le regard sur Cecil, les yeux implorants, larmoyants, et un maigre sourire s'était dessiné sur son visage, faisant fi de la violence morale qu'il appuyait contre elle. Ca lui était égal, elle voulait qu'il l'aime, comme ça et pas autrement, car c'était comme ça que Cecil l'aimait depuis toujours.

Elle avait levé ses mains sur les joues de son frère, et ses doigts en glissèrent pour s'en séparer presque aussitôt.

Je sais. Je sais, et je n'ai jamais failli.

Elle secoua la tête, papillonna de ses paupières fatiguées, mais ne détourna pas une fois le regard de lui. Ne se permettrait jamais de le fuir, de lui manquer de loyauté.

Je ne t'ai pas trahi, Cecil. Je suis maladroite. J'étais préoccupée. C'est vrai, Ace m'a appris qu'une des leurs a organisé la disparition de Pheme.

Et c'était vrai.

Mais tout s'est passé si vite, et il y avait cette réunion.

Elle déposa ses mains sur celles de son frère.

Quand on se parlait c'était toujours pour être fâchés. Tu es nerveux, tu me fais payer des choses que je n'ai pas faites. Tout ça parce que tu n'aimes pas celui que j'ai choisi pour être notre outil.

Elle ferma ses doigts sur lui.

Car c'est ce qu'il est, Cecil. Tu ne le vois pas ?

Elle utilisait Ace, comme elle l'avait toujours utilisé. Elle se servait de ses propres émotions, de son propre amour, de sa propre dépendance, elle se prostituait, Blanche, comme elle le faisait toujours. Au profit de Cecil.

Notre histoire, à lui et moi, qu'a-t-elle apporté ? Tu es monté si haut, et aujourd'hui tu règnes. Bientôt je te ferai régner sur le monde entier. Tu as voulu me vendre pour tes intérêts.

Elle secoua la tête pour l'empêcher de répondre.

Je sais que tu l'as fait. Mais ne sois pas inquiet. Je ne suis pas fâchée. Parce que je suis d'accord. Je veux que tu me vendes. Je me vendrai pour toi. Pas parce que tu le demandes. Parce que je veux le faire. Je veux t'être utile. Et je le serai.

Resserra encore un peu plus sa prise sur ses mains.

Mais tu dois l'accepter, une bonne fois pour toutes. Et si tu l'acceptes, alors tu pourras voir que tout ce que tu sembles rejeter... et me reprocher, depuis des mois...

Avec conviction, mais une voix douce, presque amoureuse.

N'a fait que te servir. Toi, nous, personne d'autre. Je me suis vendue pour toi, et je le ferai encore. Tous les jours, si c'est ce qu'il faut pour que tu sois roi. Tu es le seul qui compte, Cecil.

Orion Clinic
Suite directe de "blood of my blood"

Bien sûr que leurs disputes étaient plus importantes. Blanche n'avait jamais prétendu s'intéresser aux gangs et à leurs enjeux. En revanche, elle s'était toujours intéressée à ses frères et à leurs liens. Comment pouvait-il seulement douter de l'ordre de ses priorités, comme s'il l'apprenait sur le tas, alors qu'elle avait toujours été claire à ce sujet ?

Au fond d'elle-même, Blanche ne voulait admettre que son frère ne faisait que projeter sur elle, plutôt que de l'écouter ; plutôt que de s'intéresser. De la même manière qu'elle projetait sur lui, plutôt que d'accepter ce qu'il était.

Mais alors qu'il parle de Ace, elle occulta ce qui se froissa en elle, se satisfaisant de ce qu'elle considéra comme une victoire, sans songer un seul instant qu'elle n'en était pas une.

Il ne me fera pas de mal, de toutes façons.

Alors elle hocha la tête frénétiquement.

Tu verras, Cecil. Je te ferai devenir roi.

Elle se releva, les doigts quittant le contact de son frère, et le regard plein de lumières hypnotisé par le sien.

Je peux sortir ... ?

Comme en demande ; as-tu fini de me punir ?