Il a un dilemme, Enif. Il a plus de came, Enif. Alors il appelle son fournisseur ; et ce salop lui fout un plan. Alors là. Ni une, ni deux, il change de contact. C’est la troisième fois que ce débile est pas foutu d’être professionnel ; ça sera la dernière avec lui.
L’a l’air un peu spé, ce dealer mais bon. C’est un pote des CC qui lui a filé le numéro, ya aucun risque. Au pire, c’est de la mauvaise came. Au mieux, ça sera fun. Un dealer qui fait une transaction dans un parc d’attractions ; c’est pas banal. Surtout avec un t-shirt des super nanas.
Le bleu débarque donc à l’endroit du rendez-vous. Il se prend un hot-dog hors de prix, et cherche des yeux le t-shirt sus-cité. Le vêtement se cache derrière une énorme barbe à papa. Levant ses lunettes de soleil, le camé sourit de toutes ses dents. C’est qu’elle est motivée, la donzelle.

« -Yooo ! C’est donc une compère de cheveux avec qui je fais affaire ?! », Rétorque le mécano. Il s’assoit à table en finissant d’engloutir son hot-dog. « -J’ai une fabuleuse idée, d’ailleurs : Dans tous les cas, je n’achète jamais rien sans goûter. » Le rictus d’Enif s’élargit. « -Du coup : viens on goûte, on profite des attractions pendant notre perche, et comme ça j’pourrais te dire en toute confiance si j’achète ta came ! »

Il pose son menton dans sa main, le coude sur la table. Laissant ses lunettes de soleil retomber sur son nez, l’once adresse un regard espiègle à son interlocutrice. L’a l’air jeune. Ca veut pas dire grand-chose sur cette planète de mort, mais tout de même. L’en a croisé des dealers, des malfrats. Des types qui vendraient leurs mères, leurs sœurs et leurs filles pour un beau billet. Et si elle en fait partie, c’est qu’elle a plus de casserole qu’un showroom de cuisiniste. Pose pas de questions, va.

« -Alors, qu’est-ce que t’en dis ? »

L’aura tout le temps de voir la carapace péter.

Et la voilà qui se prend au jeu. Et l’autre qui sourit de plus belle. Les badauds, autour d’eux, qui font semblant de ne rien voir ; alors qu’ils se montrent, se proposent et s’échangent de la drogue. Les deux bleus se lancent des sourires de conspirateur, et voilà Nif Nif qui sort sa propre conso.
« -Tiens, j’ai une idée : tu goûtes ma beuh, je goûte la tienne. » Le rictus du mécanicien s’élargit. « -Et le temps de rouler, j’te prends une pilule ! », finit l’idiot en gobant la gélule colorée. Il se roule ce que l’on ne peut appeler, en toute décence, qu’un énorme dragon, puis lance son regard vers la dealeuse.
« -Du coup, deux solutions : soit on est sages et on attend que ça monte, soit on se rue sur les montagnes russes pour prendre notre perche à cent kilomètres heure. » L’once s’accoude sur la table pour s’approcher de la turquoise. « -De toi à moi, je préfère de loin la deuxième solution. »

Allumant son pet, le garde du corps sourit à Neptune, derrière l’écran de fumée opaque qui monte mollement depuis sa bouche entrouverte.
« -Quitte à être dans une fête foraine, autant se retourner le crâne ET l’estomac, tu trouves pas ? » les sourcils d’Enif s’envolent vers d’autres cieux : il a une idée, le con. Et elle est lumineuse. « -Viens on fait un pari ! Le premier qui vomit, mange ou abandonne une attraction doit payer une bouteille à l’autre. » Clin d’œil adressé à la collègue capillaire. « -Après, je comprends que t’aies peur ! Je voudrais pas te forcer, surtout. », finit Enif.

L’a envie de jouer. De se faire virer du parc d’attractions parce qu’ils ont voulu acheter une barbe à papa de deux mètres de diamètre. De choquer les familles bien-pensantes de la planète rouge, à être visiblement complètement perché au milieu des manèges. A proposer une taffe de son pétard à la mascotte qui les regarde avec envie, sous son costume ridicule et puant.
L’a envie qu’en partant, toutes les personnes présentes soient en pleine overdose de bleu.