- Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ! … C’est comme ça que l’histoire de la douce ingénue aurait dû se clore.Aux parents de Diane importait énormément l’avenir de celle-ci. D’aucun aurait dit qu’ils l’élevaient dans la pure et stricte tradition terrienne. En elle étincelait l’espoir familial d’un héritage prospère qui perdurerait encore de longues années jusqu’à marquer l’Histoire. Évidemment, Diane aurait apprécié avoir voix au chapitre alors que son avenir était en jeu. Elle aurait aimé clamé son désintérêt pour l’argent et la renommée, y préférant une vie de simplicité. Cependant enfermée dans l’ambition de ses parents, elle n’avait d’autre choix que d’obéir à chacun de leurs calculs méthodiques.
La demoiselle souffrait d’une profonde frustration. Elle n’avait jamais eu droit de jouer, de se complaire dans la musique ou de donner librement son avis. Sa vie n’ayant été guidée que par les décisions prises par ses parents, elle ne se rendait pas compte de l’immensité de la liberté qui lui avait été éclipsée. Pourtant, ce qu’elle entrevoyait dans l’obscurité lui laissait présager qu’il y avait plus à découvrir de ce monde que les bienséances, le devoir marital et le développement de l’esprit au bien-être d’une situation confortable.
A l’âge de dix-huit ans, Diane s’était résignée à une vie de sacrifices dont elle espérait secrètement se défaire lorsqu’elle aurait la puissance de briser ses chaînes. Néanmoins, même si elle épousait en majorité l’idéologie de ses parents pour l’heure, elle se refusait d’épouser une personne en qui elle ne croyait pas. L’homme était bon et, surtout, un bon parti. Il possédait une certaine influence sur Mars et l’entreprise familiale convoitait ce territoire depuis longtemps, incapable de s’y implanter en raison de la situation chaotique des cités marsiennes. Un appui connaissant le terrain serait l’atout qui leur permettrait de supplanter ces contraintes. Livrer Diane était l’occasion unique de placer leurs premiers pions sur l’échiquier marsien.
- Une jolie affaire, rondement menée, qui lui apporterait gloire, prospérité, patati et patata, bla. Bla. Bla ! Toujours ces mêmes rengaines incessantes et barbantes.Le mariage avait lieu sur Mars. La famille des mariés n’avait pas lésiné sur les invitations et quiconque avait un lien de près ou de loin avec l’affaire avait été convié. Diane n’avait rencontré l’homme qu’à trois reprises : une première pour les présentations, une seconde pour le choix du thème et une troisième pour la répétition de la cérémonie religieuse. Lui ne semblait avoir aucune difficulté à envisager la situation et se complaisait dans de grands sourires enjoués. Diane avait beaucoup plus de mal à jouer la comédie avec lui et lui présenter une facette positive de sa personnalité.
(Une échappatoire subsiste.)Tic
- Excusez-moi, je dois m’absenter un instant.Avait-elle annoncé en quittant ses maquilleuses et sa loge.
(Tu le sais déjà.)Tac
Diane se retourna.
Personne dans le couloir.
Apposant une main sur son crâne, elle se dirigea vers les toilettes. La porte claqua contre le butoir avant de se refermer tout aussi violemment. Tant pis pour le maquillage, la demoiselle avait besoin de se rafraîchir le visage, de souffler un instant.
Ses maux de tête n’arrêtaient pas de s’amplifier à mesure que le mariage approchait. Dans une heure, elle serait une dame de la haute société. Elle aurait de nouveaux devoirs et la puissance qu’elle avait tant espérée acquérir. Elle serait aussi contrainte de passer le restant de ses jours avec un homme dont elle arrivait à peine à retenir le nom.
Tout ça lui faisait entendre des voix.
(Ce ne sont pas des voix.)Tic
Ainsi s’allumèrent pour la première fois les lumières magenta.
- C’est la solution.Tac
« Chère Mère,
Je vous aime…
Je suis désolée, je n’étais pas assez bonne. »Tic
Tac
« Cher Père,
Pardonnez-moi.
Parce qu’à vos yeux, je n’ai simplement jamais compté.
Dans mon cœur, je sais que je vous ai déçus, mais vous alliez me laisser ici toute seule. »- Ils m’ont tous ignorée. Ils m’ont tous abandonnée.(Non.)Tic
(Justement, vous ne m’avez pas laissée seule.)Tac
(Vous m’avez abandonnée à elle.)- Promenons-nous dans les bois… Pendant que le loup-Tic
Tac
(Je ne doute pas que vous m’auriez enfermée si vous aviez su ce que vous aviez créé.)- Ils étaient mes amis. Nos amis.Tic
Tac
- HihihihihihiTicTac(J’aurais aimé que les choses se soient déroulées différemment.)- J’ai entendu dire… que ça allait… faire…BOOM(De cette vitre opaque, qui ne retrouve jamais sa clarté, je ne peux que contempler à distance les bougies allumées en votre honneur.)- De très jolies bougies ! Elles ne demandent qu’à se consumer dans un immense feu de joie.(Hors de question !)- Nous ne sommes plus à quelques torches près.- Il n’y a pas de nous qui tienne, démon. Tu en as assez fait.Les lueurs magentas disparurent du regard de Diane. Malheureusement, elles finiraient par ressortir tôt ou tard.
La demoiselle soupira. Épuisée de porter ce fardeau. Épuisée de fuir. Épuisée par les événements.
Dans son drap sombre, autrefois d’un blanc immaculé, les larmes se mirent à couler. Si elle voulait survivre, elle le savait, elle devait courir et franchir ces imposants murs de béton. Ils avaient été conçus pour contenir les invasions externes et non pour y retenir un haut dignitaire enfermé. Aussi, Diane n’eut aucun mal à les traverser.
Transie de froid, sans la moindre carte à sortir du chapeau. Un nouveau monde s’étendit à elle. Un monde dans lequel elle n’était pas la bienvenue. Un monde où les rêves échouaient.
Une vie de paria.
Ses pas ne tardèrent pas à la guider dans les quartiers où aucun terrien n’oserait poser pied par les temps qui courent. Passant sous les néons des enseignes, à chaque détour de ruelle, elle s’émerveillait et s’effrayait de cet univers qui lui était parfaitement inconnu. Elle s’enfonçait dans l’obscurité de Venus Ville. Là, où elle ne serait qu’une paria parmi tant d’autres.
Son capuchon ne fit pas illusion très longtemps. Une jeune femme se promenant seule au milieu de la basse société, quand bien même elle avait été rejetée d’en haut, personne ne l’avait invitée ici-bas. Les clochards se proposèrent gentiment de la délester de ses affaires. Ils sauraient en faire meilleur usage qu’elle. Entre le couteau et la main tendue, Diane n’hésita pas et choisit celle qui la maintiendrait en vie.
Dépouillée de ses possessions et de son identité, que lui restait-il ?
(Moi.)- Sors de ma tête !Quand cette personne la vit allongée le long d’une poubelle, son regard s’éclaira.
Il lui prêta sa main, dans laquelle se tenaient les habits qu’il avait récupéré auprès des clochards.
Il était le premier depuis longtemps à lui montrer de la bonté, alors quand il le lui demanda, elle lui confia son nom…
- Di-… Sins. Je me nomme Sins.Celui que l’autre avait choisi pour elle.
- Résumé:
- Diane est née dans une famille mondaine terrienne. Elle n'a pas eu de réelle enfance et n'a été élevée que dans l'objectif de reprendre l'affaire familiale.
- Dès qu'elle fut en âge de se marier, ses parents arrangèrent un mariage avec un homme influent de Mars afin d'étendre leur Empire à la planète qui leur était jusqu'alors inaccessible. Diane a beaucoup de mal à l'accepter, sachant que le divorce n'est absolument pas envisageable dans son univers.
- Le mariage a lieu sur Mars et Diane découvre sa faculté par la présence d'une petite voix dans sa tête qui la pousse à briser ses chaînes. Aux derniers instants, elle la laisse prendre le dessus et celle-ci provoque la mort de son futur mari, sa famille et d'autres convives en dommages collatéraux.
- La fuite est évidemment l'option prise par Diane une fois ses esprits retrouvés.
- Elle se perd dans les profondeurs de Venus Ville et finit par tomber sur la Pomme Pourrie. Celle-ci voit en elle un pion potentiel sur son échiquier et lui tend la main, qu'elle prend.
- Elle rejoint les rangs de la Pomme Pourrie et ceux des CG pour lui, puis pour les deux ceux des PIC.