Quand il a fermé les yeux, il n'a suffit que de dix minutes pour qu'il disparaisse, laissant derrière lui un tapis de poussière. Assis sur une chaise, le visage déposé dans le creux de la main, tu dessinais son portrait - avais tracé sur le buvard le contour de ses traits si parfaits. Alors qu'il n'est plus, sur le papier reste gravée au fusain une forme inachevée.

Tu connais les détails de la mort sur cette planète, elle n'est jamais réellement complète. Callum reviendra dans un jour ou deux, là où il s'est endormi pour la dernière fois dans les bras d'Hadès. Le Styx lui aura volé une partie de son âme, surement sa raison et sa raisonnabilité.  
Il va t'ignorer, feindre ton inexistence et si Callum prévient, Callum s'y tient. Tu acceptes avec cruauté la dure réalité de vos prochains échanges (qui n'auront pas lieu).


Plusieurs jours sans nouvelles, tu traines au casino ou à l'hôtel. Le temps semble s'être arrêté et peut-être même que ça fait des semaines. Tout est aussi vide qu'ennuyeux, les rumeurs d'un traitre chez les Black Rotteneggs se sont répandues sans réellement se propager. Les fêtes de fin d'années et la disparition de vos pouvoirs ont occupés les gangs et le grand manitou.

Telle une ombre machiavélique, tu as décidé de le pister (en manque) pour voir à quoi il est occupé. Toute la journée tu l'espionnes espionner la proie qu'il traque - sans savoir que lui même est sous la coupe avide d'un prédateur sans remords.

Il entre dans la petit magasin, passe dans l'arrière boutique, sûrement pour coincer sa victime sans qu'elle ne puisse s'enfuir. Tu en profites pour te faufiler à l'intérieur, tournes la pancarte "closed" côté rue et les rejoins à pas feutrés. L'arme à feu dans la main, tu restes appuyé contre l'encadrement de la porte. L'homme crie, pris au piège entre les étagères. Il cherche son arme en tapotant l'intérieur de sa veste. Avant que Callum ne puisse dégainer, ton coup est déjà parti. Tu souffles avec délicatesse et style sur le viseur et passes une main sur ton smoking violet pour t'essuyer.

— « AH ! Un revenant ! »

Tu mimes une mine surprise, presque qu'horrifié face à un fantôme puis glousses avec mesquinerie.

— « J'espère qu'il n'avait pas des informations capitales à te cracher. »

Les mains derrière le dos, tu penches légèrement la tête sur le côté.

— « Je t'ai manqué ? »

Il y a quelque chose de différent en lui. Il a l'air d'avoir changé, mais qu'est ce que le bon dieu lui a volé ? Tu cherches à décrypter son âme quand il pose ses yeux sur toi. Il n'a plus la passion brûlante dans le corps, n'a plus la curiosité piquante dans le regard. Ça te vexe, Duke. Tu n'as plus l'impression d'être un joyau inestimable - juste un putain de caillou sans valeurs. Tu sens redescendre l'euphorie un instant alors que tu lui rends la même expression de colère. Vous n'êtes juste pas énervés par la même tare.

— « Quoi ? Ne me dit pas que tu l'as mal pris, si ? »

Il te rentre dedans pour te pousser. Tu sautilles vers l'arrière, l'interpelles avec exaspération lorsqu'il tente de s'en aller.

— « Eh Quinn ! Tu vas faire la gueule longtemps ?! Reviens, c'était juste une blague. »

Tu pointes ton arme derrière lui, enfonces le viseur contre l'arrière de son crâne. Ta voix est toute de suite moins légère.

— « Reste ici ou je t'envoie rejoindre le ciel une deuxième fois. »

Capricieux Duke, cela fait trop longtemps qu'il te puni. Trop longtemps que tu te forces à rester loin de lui - et tu arrives à ta limite.

— « Ça suffit maintenant, je te veux de retour. »

Si ça continue c'est toi qui va dépérir. Ici rien n'a de sens, rien n'a de vie. Tout ceux qui gravitent autour de vous sont sans saveur et tu n'as pas encore décidé de tirer un trait sur le fruit le plus mûr du panier.

Tu frissonnes d'excitation à le voir aussi énervé, ça réveille des humeurs joueuses et jouasses. Tu frétilles, virulent - le regard écarquillé d'insolence. C'est que la porte de prison s'est fermée pour de bon et t'en viens à y frapper désespérément. Sans personne pour te regarder et pour te céder, tu n'existes plus vraiment. Et si tu n'existes plus, tu dépéris.
Callum n'a peur de rien, encore moins du canon du flingue qui s'enfonce dans sa joue. Tu fais craquer tes cervicales et les articulations de ta nuque à l'arrière, souffles bruyamment pour insister sur ton agacement.

— « Ok ok ok. Tu es blessé dans ton estime personnelle. »

Tu relèves légèrement le menton pour le prendre de haut, accentuant le ton paternaliste.

— « Tu sais, si tu as des problèmes, tu peux en parler à quelqu'un. Je suis sûr qu'il existe des prises en charges psychiatriques à Venus Ville. »

En un éclair, il compresse tes poignets, te cogne contre le premier mur venu. Après avoir grimacé de douleur, tu te fends d'un rire névrotique.

— « Hahaha ! Ça m'avait manqué, je dois le reconnaitre. »

Inspires et expires par le nez quand il écarte tes cuisses. Tu ne peux empêcher ton sourire de s'étirer jusqu'aux oreilles, les cernes sous tes yeux et le teint blafard accentuant le marquage de ta folie sur tes traits. Tu glousses, provocateur et tiques quand il cogne tes poignets contre le béton. Tu te cambres et viens caler ta jambe libre derrière la sienne pour le retenir prisonnier.

— « On perd tous des choses, ainsi va la vie. Tu es revenu, regarde ! C'est le principal non ? »

Tu murmures, insidieux et culpabilisant.

— « Tu ne vas pas faire ta chouineuse Quinn. Ouin ouin Duke Hawkins m'a assassiné parce que j'ai cru que je pourrais le sauter en acceptant de me droguer. »

Tu laisses tomber ton arme, et le coup part dans une étagère derrière vous, trouant une conserve de jus de tomate, celle-ci se répandant sur sol.

— « En effet, ça me manque. »

Il t'emmerde et chaque mot que tu prononces est un poison destiné à le faire lentement craquer - surement pas clamser parce que ça c'est déjà fait. Tu roucoules à répétition, ricanes comme un enfant impuni à chaque fois qu'il te répond de la même indignité. Tu n'as pas peur, Duke, ni des faibles ni des forts. Personne n'a réussi à te mettre à genoux, sauf ceux pour qui tu as volontairement ployé. Tu serres les dents quand il appuie encore, mais ne bouges pas d'un pouce. Ce n'est pas parce qu'il t'accule qu'il te piège - l'esprit demeure libre et toujours d'attaque à foutre la merde.

— « HAHAHA ! J'aimerai bien voir ça. Ça, ça serait une mort spectaculaire et mémorable. »

Lui craches à la figure un rappel :

— « Pas comme la tienne, pathétique et oubliable. »

C'est une douce agonie que tu lui offres de nouveau. Tu te laisses faire, même s'il est ferme et fermé. Même s'il te fait les gros yeux du mec énervé. Tu veux casser la coquille pour t'y immiscer. Tu veux qu'il craque et lève la punition qu'il a posé. Sourire charmeur et tu ne te débats pas une seule seconde face à sa menace. Tu te contentes de plaquer ton crâne contre le mur.

— « Et bien et bien... Comme quoi le désir n'est pas mort dans l'œuf. »

Tu le défies d'oser.
Le défies de prendre.
Tu le défies d'oser prendre.

— « Tu peux essayer, Callum. Mais je ne suis pas sûr que tu aies de quoi me faire hurler. »

Il n'a pas beaucoup de volonté Callum, et sa modération est morte avec lui. Tu te demandes un instant ce que toi tu perdrais s'il venait à te tuer. Il n'y a déjà pas grand chose qui tient la route. Tu soupires d'aise sous ses doigts et l'éclat se ravive dans tes yeux. Il va craquer il va craquer. Tu attends comme une petite teigne qu'il finisse par plier, et ses lèvres trouvent les tiennes. C'est une victoire que tu peines à réfréner de savourer. Tu ris entre deux salves de baisers, moqueur et mauvais gagnant.

— « Toujours. »

Il soulève ta chemise, et t'as aucune pudeur Duke, donc tu le laisses faire - observes avide les réactions que tes cicatrices lui provoquent. Tu te tortilles comme un ver, lubrique et gémis un peu plus fort. Tu grossis le trait, as presque l'air grotesque. Tu simules Duke, pour l'exciter et lui foutre la honte.

— « Dis-le, que je suis meilleur que ces petits mecs que tu te tapais en prison. »

Tu penses à Ceres, l'espace d'un instant. Tu te places en compétition avec la propre femme que tu veux posséder.

— « Dis-le, que je suis meilleur qu'elle. »

Tu chopes sa gorge pour lui imposer une certaine distance, le tiens en otage alors que tu descends la braguette de ton pantalon.

— « Dis-le, que je suis trop bon pour toi. »

Que t'es aussi toxique qu'un parasite. Tu te faufiles pas, le relâches pour te hisser sur la pointe des pieds, niches ton visage dans son cou pour le lécher. L'arme toujours à terre t'appelle et tu sens l'odeur du jus tomate chatouiller tes narines.

— « Tu vas vraiment me prendre là, comme ça ? Au milieu des cadavres et des conserves ? »

Tu lui tapotes la joue, infantilisant et humiliant.

— « Ça te ressemble bien, Quinn. A la sauvage. »

Glisses à son oreille.

— « Ou peut-être que ton trip c'est que ça soit moi qui mène la danse. »

On sait jamais.

Oh ce que tu aimes quand il gonfle ton égo, ton désir, quand il te prend la tête et te la monte contre le monde, quand il te prend et te monte (tout court). Putain de merde c'est quoi ces allusions sur Ceres ? T'es jaloux, aigri. Tu ne lui offres qu'une grimace vexée en réponse à son sourire. Ceres, elle est à toi putain. Et lui aussi, il est à toi. T'es pas ok de partager aucun des deux, hormis dans un plan à trois. Pas sûr que Ceres accepte, faudrait que tu lui proposes autour de votre prochain déjeuner. Ouai, tu vas l'inviter à déjeuner.

— « T'as de la chance que je sois concentré sur ce que t'as entre les jambes. On était pas encore exclusif, j'irai pas regarder où tu l'as fourré avant moi. »

C'est du délire. Comme si t'en avais quelque chose à foutre. Et tes jeux de mots deviennent de plus en plus faciles, même dans ta narration Duke.
Un peu comme toi, facile.
Il te retourne et te plaque contre le mur. Tu résistes pas, respires bruyant contre les parois. Ton souffle qui laisse une auréole sur le plâtre, tu écrases ta joue finalement pour regarder vers la pièce.

— « Ah ouai, pas de préliminaires. T'y vas direct. »

Tu lui offres pas le luxe de l'exciter en gémissant. Tu te contentes de taper du poing à chaque coup de rein.


Et quand il a fini son affaire, tu te laisses glisser sur le sol. Tu remontes lentement ton pantalon. Ok ok. T'as besoin de réaliser ce qu'il vient de passer. Surprenant ? Oui. Douloureux ? Oui. Chaud ? Oui, clairement. Plutôt agréable ? Double oui, et c'est le seul point véritablement effrayant.

— « Est-ce que j'ai rempli tes attentes ? Est-ce que j'ai été bon ?! Est-ce que ça veut dire que tu m'aimes et qu'on va se marier pour le meilleur et pour le pire ? »

Tu te redresses d'un mouvement aérien, atterris sur tes deux pieds en position accroupi.

— « Oh bordel, j'ai mal. »

Passes une main dans tes cheveux une fois debout.

— « Me dit pas que tu pensais à ce cadavre pendant l'acte. Parce que moi si. Oui, c'est le moment ou... ouai c'est celui-là ouai. »

Il te tend une cigarette et tu l'acceptes du bout des doigts. Tu te hisses à lui, la clope tendue entre tes dents pour qu'il te l'allume. Inspires la fumée, expires par le nez. Tu lui souris d'un air mielleux et niais. Hausses les épaules pour sous entendre que oui, tu sais. Il se fout de ta gueule en retour, et tu lèves le poing en ricanant. T'y as cru quand t'étais jeune, à ces conneries de mariage, d'amour...

— « Désolé, je n'ai pas un passif très positif avec les animaux. »

C'est lâché comme une excuse sérieuse.
Paix à ton âme, Moustache. Non, va te faire foutre Moustache, t'étais vraiment un chat ingrat.

— « Necro-quoi ? Mais non, juste d'un petit coup de boost. »

Tu passes à côté de lui, et le bout de tes doigts s'échouent contre son torse. Ton autre main agrippe son entrejambe au travers du pantalon.

— « Je suis ton boost et... »

Tu indiques le cadavre d'un mouvement de menton.

— « C'est le mien. »

Tu le relâches finalement, enjambes le corps pour sortir de la réserve. Fais craquer les articulations de ta nuque. Tu passes par dessus le comptoir d'un mouvement agile.

— « Burger ouai. Mais je crois que si on retourne à celui de la dernière fois ça va créer des étincelles. »

Silence.

— « C'est exactement pour ça qu'on va y aller. Ravi de te revoir copilote. »

Personne ne peut te résister bien longtemps.