mais qu'est-ce que tu deviendras, enfant de fausse bonne idée, né d'une conséquence issu d'une trajectoire tracée par accident, et mis là sur la terre pour ne penser à rien ; rien d'autre que rien, et donc tout, c’est-à-dire la vie, toute la vie et ses occurrences bizarres qui te transpercent ?

toi qui te pose les mauvaises questions, et leur bricole des réponses qui se cassent la gueule, toi autour de qui les foules se dispersent, s'agitent en masses inertes vers des sorties de secours, toi qui t'attache à l'idée que les autres sont pires, tu n'en as rien à foutre d'être un moins que rien.

toi qui ne t'illusionnes plus sur l'avenir de l'homme, soit tranquille et content : l'abysse t'a recraché. il n'y a pas vraiment d'explication à ta chute, on a bien regardé tomber constantinople. traîné, entraîné sans trop regarder comment ni où dans des situations tristes, tu adores ton ennui, son épaisseur, sa profondeur où tu t'asphyxies.

tu t'es trouvé des mobiles pour des crimes idiots à perpétrer contre toi-même. tu regardes la civilisation avec un sourire entendu et gobe les pilules qu'on t'a prescrites indifféremment des soupes de nouilles aux goûts artificiels. en ouvrant ta canette de boisson énergisante tu te souviens que tu es mort hier. depuis pourtant rien n'a changé.

une douce torpeur te repousse vers l'abysse qui ne veut pas de toi. vers le fond de l'existence que tu ne saurais atteindre. comme tu as hâte d'y disparaître ! tu cherches avidement les raisons de briser ce qui t'attache aux autres. tu ne crois pas en dieu puisqu'au fond tu penses l'être. qu'est-ce que tu es bête... tu flottes comme une goutte d'huile dans une mer de surmoi.

toi, tu trouves et creuses tes vortex. tu t'absorbes comme un organisme malade qui se mange tout seul. débordé par l'image que te renvoient les miroirs, les surfaces liquides et les photos de famille, tu veux juste t'abîmer. voilà pourquoi tu es tout pâle, comme un cendrier. tu t'obstines à t'infatuer avec la noirceur comme si les couleurs ne te concernaient pas.

car tu es seul dans le monde, tout seul avec ta tête et tes cheveux et tes mains, tout seul dans ton corps néantiel et son cerveau aux idées qui obscurcissent les instants ; tout seul à décider que tu ne respires que par habitude et que tu seras toujours misérable. c'est dommage pour toi.