Elle sent sa méfiance quand il rentre, qu’il découvre la chambre sans comprendre pourquoi elle l’a fait venir ici. Il ne cherche pas vraiment à découvrir la pièce d’à côté qui pourtant, serait la plus intéressante.

« Tu ne cherches même pas à tout découvrir, pour quelqu’un qui sort de sa zone de confort, je m’attendais à un esprit plus aventurier. »

Porte qui se referme derrière elle, faisant barrage du son pour ne laisser que le silence et le calme régner sur l’endroit. Au vu du bruit et de la musique constante, sans compter les possibles bagarres qu’il pouvait y avoir, elle s’était bien assurée que les chambres soient insonorisées pour laisser les clients dormir en paix dans le besoin.

Cela pouvait être choquant d’ailleurs de sortir de ce paradis provisoire pour retourner en enfer.

Avance, pour se diriger vers l’autre pièce dont la porte était ouverte, passant le pas en faisant signe de suivre.

« C’est ici que ça se passe. »

Les chambres les plus luxueuses possèdent des salons, un coin de pur tranquillité pour se poser et souffler afin de se remettre de sa soirée. Mais le détail le moins prenant, celui dont on ne fait jamais attention, reste la décoration. Quelques tableaux, des pots de fleurs, une odeur agréable.. Et des étagères.

Suivit d’une bibliothèque qui fait tout de même une petite moitié du mur.
Remplie d’ouvrage en tout genre, trié par type et par auteur, Astrée demandait toujours aux clients réservant ces chambres de bien faire attention car s’il y avait quoi que ce soit d’abimé, il devait y avoir remboursement immédiat.

« Et voilà, un coin salon avec bibliothèque et un petit bar à côté si une soif se fait ressentir. »

Sourire toujours, elle se tourne vers l’homme en désignant la pièce de la main.

« Et bien entendue, aucun son n’entre et ne sort. »

Quel intérêt sinon.

Il a l’air content, ça la satisfait Astrée.
Parce que Winter est quelqu’un de très difficile.
Alors voit la commissure de ses lèvres remonter ne serait-ce qu’un peu, c’est déjà une victoire.
Car oui, elle a bien compris que Percée n’était pas son nom. Que c’était Winter en version adulte. Il suffit de bien regarder son visage, et surtout plus important.

De l’écouter.

Astrée ne pouvant plus se reposer sur son pouvoir, elle doit compter sur les autres choses qui font qu’elle reste efficace. Ayant déjà eu des doutes auparavant sur le jeune homme quand il en avait l’apparence, il ne fait aucun doute qu’il avait bel et bien une faculty qui lui permettait d’une façon ou d’une autre de conserver sa jeunesse. Elle en avait confirmation à cet instant.

« Oui, les clients préfèrent dormir, boire, faire la fête plutôt que de lire un bon livre. Certains cependant sont utilisés, c’est rare mais les personnes cultivées existent. »

La bibliothèque est petite oui, simplement parce qu’en mettre une plus grande n’est pas utile. Cela serait de l’argent gaspillée car inutilisé. Donc cette taille est suffisante. A la base, ce n’était même pas prévu qu’il y en est mais Astrée a souhaitée en ajouter, juste pour que ça soit bien autre chose que des chambres. Que ce soit accueillant, et surtout qu’il y ai bien autre chose à faire que boire et dormir.

« … Effectivement, vu que ce n’est pas la première fois que tu viens ici, je me disais bien que tu n’avais pas encore visité les chambres les plus luxueuses. »

Large sourire, profitant de son erreur en croisant les bras.

« Contente que ça te plaise, W i n t e r. »

Et de par l’expression d’Astrée, il lui était impossible de mentir. Car son sourire et ses yeux perçants étaient convaincus de la véracité de ce qu’elle venait de dire.

Bras croisés, elle écoute et surtout ; le fixe quand il nie ses propos.
Si elle le confondait avec quelqu’un ?
Bien sûr que non.

« Je n’ai jamais rencontrée quelqu’un d’aussi râleur et salé que toi. En plus, t’as des traits similaires à quand t’étais jeune. Des rides en plus, quelques centimètres aussi, mais la même odeur de poussière et de livre et clairement la même façon de t’exprimer. »

Se rapproche pour se poster face à lui.

« Et tu m’as sortie exactement les mêmes phrases que la première fois où je t’ai fais visiter le Sunset. »

Clairement, elle le pensait plus malin.
Sauf s’il l’a fait exprès ?
Mais dans quel but ? Il aurait dû rester discret, ce n’est clairement pas le genre de personne à apprécier se faire briser sa tranquillité. Et il était clairement dans son coin avec son verre avant qu’elle n’arrive.

« Parce qu’après tout, si cet endroit peut encore te surprendre, c’est parce que t’y a déjà mis les pieds auparavant, pas vrai ? »

Coincé, il n’a aucun moyen de la contredire.
Parce qu’elle aura un argument à chaque excuse qu’il trouvera.

Bras croisés, le fixant sans se délaisser de son sourire en l’écoutant, elle écoute attentivement ses arguments en hochant doucement la tête. Juger les gens à son humeur, c’est peut-être gros. Mais il y a bien des choses qui caractérisent Winter. Alors elle le laisse continuer, analysant ses paroles avant de s’approcher avec un petit rire, les yeux rivés sur l’adulte qui se tient en face de lui.

« Sans avoir étudié les lieux ? «

Mais bien sûr, mais bien sûr.
Qui irait étudier les lieux avant de venir dans le QG des AS, hormis un ennemi ?
Pour en plus l’admettre de cette façon, il n’a vraiment peur de rien.
Ou alors il n’a rien trouvé de mieux.

« S’il y a bien une chose Winter, que tu possèdes et dont tu n’es pas prêt de te défaire, c’est ta mauvaise foi. »

Parce que clairement là, il en faisait preuve mais d’une manière tellement évidente que tout le monde s’en rendrait compte.

« Mais je te donne une chance de prouver que ce n’est pas toi, tu as juste à dire une seule phrase et je te croirais. »

S’approche, se met face à lui avec un air déjà victorieux sur le visage.

« Dis simplement que tu aimes la vie, qu’elle est magnifique, que tu es heureux de te lever le matin et que tu remercies le ciel de t’avoir donné une existence si belle. »

Et ça, jamais il ne le fera.
Même s’il devait en être forcé,
J A M A I S il ne dira ça.

« Et je veux voir de la sincérité briller dans tes yeux et un sourire en même temps, sinon ça compte pas. »

Autant aller jusqu’au bout.

Ridicule ?
Sourire agrandit encore.
Certes, mais il ne le fait pas.

Son argument tient la route mais Astrée n’est pas du genre à céder aussi facilement. Il devrait le savoir depuis le temps. Surtout qu’il ne fait que prouver encore et encore qu’elle a raison de par sa mauvaise foi sans borne.

Croise les bras, la tête penchée sur le côté.

« Tu n’as pas l’air de comprendre que c’est moi qui décide de la condition Winter, pas toi. Et tu viens encore de me prouver, grâce à ta mauvaise foi, que c’est encore toi. »

Oh, il est bien dans la mouise maintenant.

« N’importe qui aurait essayée d’argumenter en allant vers le positif. En disant par exemple que même si c’est la crise, ça n’empêche pas d’apprécier de juste pouvoir se lever le matin contrairement à d’autre, ou encore que c’est justement à cause de cette période de crise qu’il faut apprécier les moments simples de la vie. »

Car c’est quand le désespoir est partout qu’un bonheur aussi ridicule qu’un sourire et des mots d’encouragements sont les plus précieux.

« Mais tu as préféré laisser tomber dès le début en prétextant que ce n’est pas le moment de trouver la vie magnifique. Alors que si, justement. Quand on est enfermé dans notre confort, on est habitué à ces bonheurs simples que nous apporte notre quotidien. Mais quand on nous les retire, ça laisse un goût amer dans la bouche. »

S’approche, lui fait face en le fixant sans aucune gêne.

« Je me demande si t’as jamais été heureux vu le sel que tu dégages à chaque parole. »

Pour le coup, sa question est beaucoup trop sérieuse pour croire qu’elle en plaisante.

Tout le monde est différent, bien sûr.
Mais tout le monde ne voit pas le négatif aussi souvent que lui et, à sa connaissance, il est bien le seul à être ainsi. Bien entendu dans la vie il y a ces moments où tout va mal, où tout à l’air de partir de travers et que le ras-le-bol se fait sentir.

Seulement pour Winter, elle a l’impression que c’est le cas en permanence.

Ainsi, quand il ne veut pas répondre à sa question, son air se fait plus neutre.

« Donc tu ne l’es pas. »

Inutile de nier.
Parce que sinon, il aurait protesté de toutes ses forces en disant que si, il l’était. Mais une absence de réponse est bien une preuve encore, qu’elle a raison. Il va vers la porte, disant encore qu’il n’était pas Winter et qu’elle pouvait le voir comme lui si elle le souhaitait mais ne rétorque rien.

Au final non, elle ne le raccompagne pas. Elle fait signe à l’agent de sécurité près de la porte de le suivre mais elle, elle s’assoit sur l’un des fauteuils en soupirant.

Winter.
Pauvre Winter.
Quelque part, elle est désolée pour lui.

Et pourtant, elle se le demande bien, ce qui a pu arriver pour qu’il soit ainsi. Parce qu’on n’en veut pas au monde sans que quelque chose le bouleverse. On ne voit pas le noir partout sans avoir vu le blanc ou le gris. Sourcils froncés, elle se promet alors une chose.

Qu’elle découvrira bien ce qui lui est arrivé.